Dimanche 8 août 1999, 7h40 :

       Déjà presque une semaine que nous avons quitté la sol de Bretagne. Jean-Philippe est reparti hier soir, radieux à l'idée de partir retrouver sa douce plus tôt que prévu. Il est vrai que Stéphanie laissera la France derrière elle pour presque un an, seulement 3 jours après la date "officielle" de notre retour d'Ecosse. Dans ces conditions difficiles, on peut tous se demander si nous n'aurions pas fait à l'identique. Je suis heureux qu'il vive une telle passion avec elle que son coeur soit quand même malade dans les paysages époustouflants des Highlands avec ses meilleurs amis. Mais nous le regrettons déjà. Nous ne sommes plus que trois.

       L'extraordinaire première semaine écoulée, le temps devenu plus nuageux et le départ de Jean-Philippe marque à l'évidence la fin d'une partie du voyage. Celui-ci a besoin d'un nouveau souffle, que nous allons cherché dans les vents balyants les falaises et les monuments mégalithiques des îles Lewis et Harris.

       Une extraordinaire première semaine en effet. L'apogée de celle-ci ayant été pour moi les journées de mercredi et jeudi sur le magnifique sentier entre Elphin et Lochinver. Vendredi fut vraiment intéressant que sur la fin. Nous avons quitté Achemvilch à midi, après un long petit déjeûner, un bon rangement et une séance de don par les "wardens" de l'AJ de denrées laissées par des visiteurs. Du début d'après-midi, seul le petit sentier d'un kilomètre ou deux, pris à la sortie de ce hameau du bout du monde, offrit de beaux panoramas sur l'océan. Tout le reste ne fut qu'une longue route bétonnée (cela fait mal aux pieds avec 18kg sur le dos), traversant de minuscules villages comme Stoer ou Clashnessie. Le guide du routard nous indiquait que la route de Clashnessie à Drumbeg était l'une des plus belles d'Ecosse. Nous ne fûmes pas de cet avis. Il commençait à se faire tard et nous décidâmes de nous arrêter à Drumbeg quand à un ou deux kilomètres à peine de notre destination, nous avons été pris dans la petite audi d'un allemand, un "birdwatcher" très sympathique, qui pouvait nous déposer à Kylesku. Nous nous étions en effet décidé à tendre le pouce puisque la route jusqu'à ce dernier point ne semblait qu'un mal aux pieds, la mer n'en était même pas visible, ou presque.

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Nous quatre entassés dans l'Audi... les marques rouges sur mes genoux ne sont que de l'éosine provenant d'une dose trop volumineuse, suite d'une chute sur du plat rocailleux... (6/8/99, vers 19h)

      Erreur ! La voiture du jeune allemand s'est arrêté au moins 5 fois entre Drumbeg et Unapool pour prendre des photos tanr les visions offertes depuis la route étaient grandioses. Des panoramas sur la mer dont je n'ai hélas qu'un faible souvenir, étant passé si vite, ma tête coincé entre deux sacs de couchage, et celle de Pierre ou Loïc faisant barrière entre mes yeux et ces paysages de petites îles, de côtes découpées, à la végétation variée, dont je n'ai pu entrevoir que des bribes insignifiantes.

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Panoramas vus de la route Drumbeg - Unapool, pris par notre chauffeur. (6/8/99, vers 19h)

      L'arrivée à Kylesku fut très fraîche mais très chaleureuse. Bien décidé à savourer l'ambiance d'un pub avec ce tout petit village (du bout du monde, également), nous nous sommes préparés à rentrer au bar du Kylesku Hotel quand le patron en tenue de cuistot est sorti pour nous dire de laisser nos sacs dehors et qu'on pouvait, pour planter nos tentes, déplacer la table se trouvant sur une petite éminence, plate et herbeuse à souhait, à cinq mètres de son établissement.
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Le pub du Kylesku Hotel (la baie vitrée), et notre campement sur le port. (7/8/99, vers 11h)
On obtempéra avec joie. On se prit même un délicieux, quoique coûteux, repas de poisson dans le pub. Cette chaleur humaine, ce repas délicieux, ce pub bien chauffé, chaleureux et accueillant dans ce petit port perdu au nord des Highlands eurent une saveur délicieuse, de celle qui vous fait voir les hommes sous leur meilleur jour.
      Samedi passa très vite. Un lever et des préparatifs matinaux qui traînèrent (comme toujours, ou presque). On organisa la suite du voyage. Le départ pour les îles des Hébrides extérieures(Lewis et Harris) fut décidé ainsi qu'une petite promenade le jour même vers les chutes d'eau les plus hautes d'Ecosse. Après avoir refait quasi entièrement nos sacs et les avoir laissés, délestés de nos portefeuilles et billets de train, dans la plus grande des deux tentes, seule encore plantée à côté de l'hôtel, au bout du village, nous sommes parti pour une promenade légère vers ces waterfalls indiqués sur la carte. Déception. Mauvaise lecture de carte ou manque d'indication dans le guide, nos chutes d'eau furent assez ridicules, compte tenu de nos espérances. Le débit naturel était même réduit à un petit filet d'eau, le reste arrivant par une conduite forcée, pour l'électricité.

       Je fis par conséquent plus attention aux paysages sur le chemin du retour, voulant quand même remplir ma journée de son quota de belles images, et le ciel nuageux depuis ce matin qui couvrait de ses contrastes le loch Glendhu balayé par le vent m'offrit ma pitance visuelle de ce jour.

       Rentrés à Kylesku, nous grignotâmes quelque chose au pub et partîmes prendre le bus pour Ullapool, Jean-Philippe continuant jusqu'à Inverness.

       Ce trajet en bus fut comme un long flashback sur la petite semaine écoulée dans les Highlands (nous ne sommes arrivés à Ullapool que mardi après-midi). Vision de l'immense et magnifique Loch Assynt, retrouvailles avec le Suilven, Canisp, arrêt au port de Lochinver, passage sur la route faite en stop pour rejoindre le plus beau sentier fait jusqu'alors, retour sur le lieu de déjeûner du mercredi, en bas du barrage et de sa conduite d'eau, enfin, arrivée à Ullapool, point de départ du vrai voyage.

       On fît nos adieux à Jean-Philippe, à la gare routière, puis partîmes faire de grandes courses (que nos sacs devinrent lourds !) au supermarché (SAFEWAY of course !). On traîna un peu au village pour se renseigner, difficilement, sur le prochain départ pour Stornoway, sur Lewis, et acheter les cartes de notre prochain lieu d'aventure. On s'installa la nuit tombante auprès du loch Achall, à quatre kilomètre d'Ullapool, pour se faire un gros repas avec des produits frais que nous fûmes (quel dommage !) obligé de consommer le soir même. D'ailleurs, cette installation tardive fut faite assez inconsciemment : sur mon idée (rendons à César ce qui est à César), on laissa des sacs à un point, Pierre alla chercher de l'eau pendant que Loïc et moi allâmes planter les tentes et trouver où le faire. La nuit tomba plus vite qu'on ne s'y attendait, et même avec nos frontales éclairant à trente mètres, il fut difficile de retrouver ceux de nos sacs abandonnés, quand les cinq cents mètres nous paraissent à deux pas en plein jour. En extérieur, on n'a pas du tout le même rapport à la distance, et on ne profite pas (c'est d'ailleurs l'une des nombreuses choses que l'on cherche !) d'un éclairage urbain : ce sont deux enseignements à retenir pour une prochaine fois !

       Aujourd'hui, ce sera encore une journée de repos, un peu comme hier, avec peut-être une petite grimpette sur un sommet avoisinant, en laissant le campement à sa place. D'ailleurs, il est 9h, je ne suis toujours pas sorti de mon duvet et et n'ai pas encore contemplé loch Achall, difficilement vu à la nuit tombante.

       J'angoise un tout petit peu sur la suite du voyage, n'étant même pas sûr de trouver des sensations aussi fortes que celles que nous avons eu cette semaine. J'espère juste que l'excitation de lointain atteint étouffera l'angoisse du paradis perdu. Wait and see.

      

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