On a pris le ferry de 7h30. La décision fut prise après avoir sérieusement envisagé le problème du retour : on doit quitter Ullapool en bus dans une semaine exactement. On ne pouvait pas se permettre de perdre une jounée à dormir et à se reposer dans ces conditions. Certes, on aurait pu occuper notre matinée et le début de notre après-midi à faire de la grimpette dans le sud de Harris, sous les conseils d'un jeune couple de randonneurs (tout mon fantasme : vivre un couple de voyageur au bout du monde (l'Islande comme eux par exmple)) qui nous a dit que c'est l'un des coins qu'ils ont trouvé le plus beau.
Ce matin donc : réveil matinal et tonique ! Pour plus de sécurité, et vu la résistance inébranlable du sommeil de Loïc, c'est avec moi, non avec son maître dormant dans le lit du dessous, que sa montre a passé sa nuit. Craignant avant de m'endormir de ne pas me réveiller à temps, je me suis réveillé, dans mon duvet tout nylon à l'extérieur, un peu précocement. Afin de voir sur la montre, placée du côté opposé au mur, combien de minutes bénéficiait encore mon corps engourdi de sommeil, en me tournant bruillamment sur ma couche couverte d'un épais film plastique émettant sans cesse des sons de froissements, le nylon sur le plastique fit son effet, et mon corps dans le vide fit sa chute. Réveil tonique et matinal donc ! (5h45 tout de même) Heureusement amorti par les sacs de Pierre et Loïc, dont le bruit sourd de mon atterrissage constitua la sonnerie de leur réveil.
Crainte : Loïc commence à avoir sérieusement mal au genou. Difficile de continuer à faire de longues marches dans ces conditions. Il faudra peut-être aller voir un doc.
Le temps est devenu très écossais : la grisaille et un crachin intermittent nous ont cueillis dès notre sortie de la Bankhouse.
J'ai appelé mon père hier soir pour prendre connaissance du courrier et des coups de téléphone qui m'auraient été destinés, et pour donner de mes nouvelles comme j'avais promis de le faire au moins une fois pendant le voyage. Premier contact direct avec la France depuis mon départ. La "magie" du téléphone qui abroge toute distance m'a fait de nouveau rendre compte du merveilleux éloignement que j'ai atteint, de la chance que j'ai d'être si loin, de voir et d'avoir vu des paysages si grandioses par rapport à mon quotidien. Ce départ pour Skye laisserait-il derrière moi (et nous ?) la petite lassitude qui traîne depuis le départ de Jean-Philippe, comme il laisse mon bâton de marche oublié dans le coffre d'une voiture ? Les dénivellés des sentiers du Wester Ross, dernières partie du voyage avant Londres, serront plus durs sans ce derniers mais plus légers sans la première.
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